Les membres de l’Instance savent pertinemment qu’en l’absence d’un système transparent et sans corruption, toute réflexion sur la classification dans les prisons tunisiennes est prématurée. C’est en fait le «Kabrane», le chef de chambre, qui classifie les détenus dans des lieux surchargés et manquant de tout. Dans ce contexte-là, la classification est une aberration.
La rencontre se tient en marge de la célébration de l’anniversaire de l’adoption par l’Assemblée générale des Nations unies du protocole facultatif contre la torture et en parallèle avec la Première semaine culturelle pour la prévention de la torture (Cité de la Culture). La séance plénière s’est tenue en présence des ministres de l’Intérieur et de la Défense. Lors de cette séance, Fathi Jarray, président de l’Inpt, a présenté le thème du colloque en insistant sur la définition du concept de classification. Il a expliqué que «la classification des détenus vise à s’assurer que ces derniers sont placés dans un environnement correspondant à leurs besoins. Le but ultime étant de permettre à ces derniers de réussir leur future réintégration et à l’administration sécuritaire d’assurer la sécurité des établissements privatifs de liberté».
Un processus continu
Selon des normes appliquées notamment aux Etats Unis et dans quelques pays d’Europe, la classification des détenus est un processus continu, évolutif, qui commence à l’admission et prend fin lorsque le détenu finit de purger sa peine.
l’Inpt préconise que des mécanismes de révision périodiques soient installées pour permettre la révision périodique de la classification d’une personne privée de liberté.
Fathi Jarray ajoute : «La nature du traitement au sein de l’espace carcéral peut varier d’une personne à l’autre et résulte de la prise en compte de besoins particuliers, notamment ceux des personnes appartenant à des catégories considérées comme spécifiques ou vulnérables en détention : femmes, mineurs, personnes souffrant de troubles mentaux ou de handicap, toxicomanes, mais aussi ressortissants étrangers, personnes âgées, migrants, personnes détenues pour des violations graves des droits de l’Homme, personnes LGBT… ». Dans ces cas précis, les aménagements consistent en la mise en place de mesures de protection supplémentaires.
Mise en place en 2016, l’Inpt est une instance publique indépendante dotée de la personnalité morale et de l’autonomie administrative et financière. Elle est composée de 16 membres élus, experts en différents domaines relatifs à son champ d’intervention : la torture. Sa mission principale est d’organiser des visites aux centres d’arrêt et de détention, la diffusion d’une culture de lutte contre la torture, la collecte des données, l’accueil des plaignants et le recueil de leurs plaintes et témoignages en matière de torture. Avec le thème de ce colloque, l’Inpt tourne le dos à son champ d’expertise et d’investigation, à savoir l’Etat des lieux de la situation de la torture en 2019, pour aller explorer un sujet qui anticipe sur le présent. Ce présent fait de poursuite des violations des droits humains et de pratiques inhumaines notamment dans les lieux de garde à vue, selon les rapports de nombreuses ONG des droits de l’homme tunisiennes et internationales.
Les membres de l’Instance savent pertinemment qu’en l’absence d’un système transparent et démuni de corruption, toute réflexion sur la classification dans les prisons tunisiennes est prématurée. C’est en fait le «Kabrane», le chef de chambre, qui classifie les détenus dans des lieux surchargés et manquant de tout. Dans ce contexte-là, la classification est une aberration.